Lors de mes consultations Parents-Enfants, les parents m’interpellent souvent sur le sujet des écrans et de son impact sur le développement de l’enfant. En Avril 2020, le Soir m’avait invitée pour débattre de la question, surtout en cette période particulière de confinement. vous trouverez l’article en dessous :

Les écrans peuvent avoir un impact négatif sur le développement des enfants, mais en cette période de confinement. Rien ne sert de dramatiser ou de culpabiliser les parents. Pas de télé avant trois ans, pas de console avant six ans et pas d’internet avant neuf ans. Voilà pour le cadre théorique conseillé, notamment par la Fédération Wallonie-Bruxelles aux parents. Une règle bien plus difficile à faire respecter aujourd’hui alors que ces écrans représentent souvent le seul contact avec le monde extérieur.

Le « facteur quantité »

En cette période où chacun fait de son mieux, il serait malvenu de faire culpabiliser les parents. Tout le monde n’a pas la chance d’avoir un jardin dans lequel s’aérer et pour permettre aux enfants de jouer. « Ce qu’il convient d’éviter, c’est la surstimulation cérébrale », explique Marie Stievenart, chargée de cours à la faculté de psychologie de l’université de Liège et responsable du service de clinique et psychopathologie de l’enfant du CHU. « Des images trop rapides, des flashs de couleurs, de son trop vifs. Les enfants surtout avant trois ans ne sont pas armés pour gérer de telles stimulations cérébrales. Les risques sur la qualité du sommeil et sur l’agitation des enfants sont bien documentés. Mais il ne faut pas dramatiser non plus, le facteur quantité est lui aussi extrêmement important. Si un enfant regarde la télévision dix ou quinze minutes par jour, c’est loin d’être dramatique et parfois, les parents n’ont pas forcément le choix. Il est également important de ne pas perdre de vue que l’important, c’est que l’enfant puisse faire autre chose de sa journée. Jouer, découvrir le monde, interagir avec ses parents, etc. Si sa journée est bien remplie, ce ne sont pas quinze minutes d’écran par jour qui vont avoir un impact très néfaste sur son développement. Regarder un programme TV adapté à l’âge de son enfant avec lui peut même être une occasion de passer un moment de qualité parent-enfant. Pour peu que l’on interagisse avec lui, que l’on commente et que l’on explique ce que l’on voit ».

A l’heure des vidéoconférences

De manière générale, il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain : en ce moment, l’écran peut être un formidable outil pour continuer à développer ses liens sociaux sans avoir besoin de sortir de chez soi. Si on imagine un enfant d’un an et demi dont les parents se sont toujours montrés prudents et ne l’ont jamais exposé aux écrans. Difficile de maintenir cette hygiène de vie alors que les vidéoconférences deviennent monnaie courante. « Si une petite peut voir sa tante sur la télévision, ou l’écran d’ordinateur, pendant que ses parents sont à côté et qu’elle peut voir le chien de ses grands-parents à l’image faire des coucous, etc… Cela joue un rôle de socialisation important », note l’experte.

« Si l’enfant continue par ailleurs de faire sa vie, d’aller chercher ses jouets, et se balade pendant la discussion, c’est bon signe et cela signifie que son rapport à l’écran est sain. Enfin, si une exposition trop importante aux écrans n’est pas une bonne chose pour le développement de l’enfant, il ne faut pas oublier que leur montrer qu’il est possible d’interagir numériquement avec ses proches a de fortes chances de développer des compétences futures comme le rapport au virtuel et aux machines. L’essentiel, est de rester dans la mesure ».

Les ados face aux jeux

Bien sûr, il n’y a pas que les enfants en bas âge pour qui les écrans peuvent poser un problème. Les ados, par exemple, peuvent passer beaucoup de temps sur des jeux vidéo ou sur des messageries en ligne. « Souvent, il s’agit d’un moyen pour eux de garder le contact avec leurs amis. Dans le cas des jeux, on peut également en faire un moment agréable en famille. Mais il faut veiller à ne pas forcer son adolescent. Il faut pouvoir respecter leur espace s’ils veulent jouer seuls ou avec leurs amis. C’est important pour un ado de profiter de moments d’indépendance. Mais ici encore il faut rester vigilant vis-à-vis des comportements problématiques comme jouer la nuit ou l’irritabilité. Le tout, c’est que l’ado puisse s’arrêter de jouer quand on lui demande et respecte les limites établies. Même s’il est naturel pour un adolescent de chercher à repousser les limites ».

Enfin, cette période est l’occasion de dédramatiser. De nombreux parents, et c’est tout à fait normal en cette période pourront se montrer plus coulants envers l’utilisation des écrans de leurs enfants. Beaucoup vont se rendre compte que ce n’est pas parce qu’ils passent plus de temps sur Netflix ou sur Fortnite, qu’ils se transforment subitement en monstres. « Il faut toutefois penser à l’après, expliquer aux jeunes qu’on leur laisse plus de libertés aujourd’hui, car le contexte est particulier, mais que les bonnes habitudes reviendront une fois la période de confinement terminée ».

Comment se protéger soi-même des écrans ?

Entre le télétravail, le semblant de vie sociale par webcam interposée et les loisirs numériques, les enfants ne sont bien entendu pas les seuls à être confrontés à des écrans à longueur de journée. Quelques gestes permettent heureusement de lutter contre la surexposition.

Le smartphone est probablement l’appareil que l’on sollicite le plus en cette période. Un des meilleurs moyens de limiter son utilisation est sans doute de couper les notifications. Android comme iOS permettent de gérer les notifications soit totalement, soit application par application, pour éviter de se voir déconcentrer en permanence.

Les écrans modernes diffusent de la lumière bleue en permanence. Or certaines études montrent que ce spectre lumineux retarde l’endormissement et contrarie l’horloge interne, surtout en cas d’exposition en soirée. Privilégier les « modes nuit » et les couleurs chaudes sur les écrans en soirée permet de lutter contre cette exposition et limiter son impact sur le sommeil.

Journaliste au pôle Multimédias Le 13/04/2020 à 18:42 – Le Soir

Par Thomas Casavecchia